Salut, moi c'est Firmin ! Comment allez-vous ? Moi ça va bien ! La patate ! La ganache ! Attendez la ganache c'est pas c'qui s'met sur des gâteaux ? Non mais j'me suis trompé du coup, j'ai pas révisé le petit Larousse depuis... Au moins jamais. Un truc du genre. Bref, moi c'est Firmin. F-I-R-M-I-N. Au cas où vous oublieriez, c'est tatoué sur mon bras. Juste ici, là.

C'est un prénom de beau-gosse ? Ouais, je sais ça. Véritable label AOP "Sex-symbol d'Opportunity". Un gage de qualité pour les messieurs et dames de cette ville où je travaille et réside depuis bientôt treize ans en tant qu'éboueur pour Hypérion, grâce, si je puis dire, au piston de mon père. D'après lui, bosser pour la firme au logo dorée, c'est la sécurité de l'emploi, l'assurance d'un salaire toujours décent pour mener une vie correct et de fait, ça évitait de finir comme un traîne savate de Down-Town ou comme ces cas-sociaux de Lynchwood ou Fyrestone.

J'parle de Down-Town parce qu'à la base, j'suis de Sanctuary. J'y ai vécu une enfance heureuse, assez basique si ce n'est que j'étais entouré d'une grande fratrie de sept frères et soeurs. Papa Gasin n'a pas chômé avec maman Charlène, dès l'an x196, il donnait naissance à ma grande soeur Ombeline pour ne s'arrêter qu'en l'an x212, avec l'arrivée de Justin, le petit dernier. Entre eux, tous séparés par deux ans d'écart, il y a eu moi, Ondine, Sixtine, Gabin, Guénin et enfin ma soeur Marine, notre petite nationaliste pandorienne.

Nous n'étions pas très riches, mais nous n'étions pas très pauvres non plus. Le salaire de technico-commercial de papa étant assez conséquent et celui-ci avait réussi à obtenir une allocation supplémentaire permettant de couvrir nos besoins et nos frais d'éducation auprès d'Hypérion, en argumentant sur notre grand nombre et en s'engageant à faire de nous des éléments utiles à la société. Enfin, c'est ce qu'il avait espéré pour nous tous mais ça n'a pas été mon cas.

Du coup, il m'a pas vraiment laissé le choix, dépité par mes résultats médiocres à l'école et l'influence néfaste que je pouvais avoir sur mes cadets plus studieux, il a fini par se faire à l'idée que son deuxième fils ne deviendrait jamais un scientifique comme sa grande soeur ou encore technicien ou médecin alors il a fait jouer ses relations dans la ville la plus sûre et la plus riche de la planète pour me trouver un poste qui ne nécessitait pas un QI supérieur à 85.

Voilà comment j’atterrissais ici, à l'âge de vingt-deux ans, au plus proche du grand Ray le Juste, faiseur d'emplois et guide suprême de Pandore. Notre raïs à nous, famille Dustriel. Je ne sais pas si je devais le remercier de m'être fait affublé d'un balai brosse et d'une tenue qui pue les détritus en décomposition mais bon, mon père avait eu raison, ça faisait vivre.

De toute façon, il avait toujours raison. Puis au final, c'est super cool de vivre ici. Y'a de la gonzesse et pas que. Y'a de la bonne bouffe, y'a de l'alcool aussi, c'est important pour bien faire la fête, s'réveiller avec un drag-queen qui s'appelle Roger dans sa piaule et une douleur inquiétante au seul orifice arrière, y'a plein de trucs à y faire quoi, ça compense avec ma tâche ingrate. C'est carrément plus classe que ce qu'on apprend dans les cours d'histoires, quand le Beau Jack ne faisait que penser productivité et que les hauts-parleurs poussaient les gens à bosser h24. J'me demande s'il avait l'temps d'baiser et de se droguer ?

M'enfin, c'est pas mon affaire, c'est une époque révolue, maintenant, c'est la belle vie ici. Personnellement j'm'y suis vite assez plu. En moins d'un mois, je m'étais déjà fait un joli cercle d'amis, un joli cercle de nanas et de gars sympathiques, bien plus cultivé et riche que moi, certes, mais j'avais réussi à y trouver ma place en utilisant mon bagoût. C'est aussi comme ça que j'ai rencontré celle qui allait devenir la femme de ma vie. Karen. Enfin, la femme qui m'entretient plutôt. Une publicitaire qui gagne assez sa vie pour payer toutes les factures et qui se déplace assez régulièrement pour que je mène ma vie comme je l'entends. Nous avons fini par nous installer ensemble dans un beau petit penthouse au bout de quelques mois seulement et j'y réside toujours actuellement, entre soirées arrosées, incinération de déchet et fréquentation de bars à hôtesses. La belle vie, la grande vie j'vous dis. Pourquoi j'continud mon taff ingrat du coup ? Bah, l'travail c'est la santé pardi... Puis mon père me tuerait s'il apprenait ma démission.

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