C’est à en devenir ridicule ! Heureusement que les clients du Patsy’s Barbiturics ont l’habitude de bien pire avec les protégés de sa majesté Red, parce que le p’tit gars en plus d’être rendu à l’avant dernier degré d'alcoolisation semble bien blasé. Quant à la tenancière des lieux elle a déjà trouvé des situations plus drôles, même lorsque Donnie devient relou. C’est pas dieu possible de se trainer des gonzes qu’assurent pas une bille dès qu’une fille est dans les parages ! Peuvent pas faire des breaks de temps en temps, Genre un ou deux ans sans que leur p’tit cœur ne chavire dès que deux papillons bleus ne croisent leur regard. Ca lui ferait des vacances et on pourrait parler de choses sérieuses. De la rébellion par exemple. Parce qu’aux dernières nouvelles ils avaient mission de renverser Hypérion tous ces types ! On n’était pas sorti de la berge et la firme allait faire des économies sur l’armement si elle apprenait qu’il suffisait de lâcher quelques dans la nature !

Elle va finir par croire qu’elle côtoie seulement des mecs à la ramasse et ça, ça s’interroge comme dirait Kath.

*Parce que oui ma vieille, tu te maques avec un qui te prostitue et te tabasse, tu te fais larguer par un mytho de première et tu ne connais que des mecs en peine d’amour ou des schizo
_ Humm Ya tout de Même Ilyas.
_ Ilyas oui. Il est où au fait ?
_ Rah ! Ta gueule ! *

Elle n’aime pas du tout cet air narquois qu’il lui balance en pleine face alors qu’elle est persuadée qu’il essaie de l’entourlouper et de la manière la plus grossière qui soit. Non mais, lui faire croire qu’il est venu à pied !

“T’oublie ton fric ! C’est pas parce que t’es impossible à vivre que je fais payer les amis.”

* Et puis remballe tes grimaces à deux balles. Putain mais tu mériterais que je te laisser aller s'exploser contre le premier gravier qui se mettra sur ton passage! *

Mais c’est qu’il insiste lui ! De quoi à force mettre le doute dans l'esprit de la rouquine. Faut dire qu’elle ne l’a jamais vu se déplacer sans sa bécane de malheur. Y en a deux comme ça : lui et Seth Walker. A se demander ce qu’ils y trouvent à leur broum-broum. Elles remplacent sûrement quelque chose, mais elle ne va pas jusqu’à imaginer que ce soit les meufs qui les ont laissés tout seuls dans leur. C’est tellement éculé comme interprétation et surtout pas très sympa pour ces deux idiots qu’elle adore.

“Bouge pas toi !”

Prise de doute, son fusil négligemment à l’épaule, elle se dirige vers la rue, passe le portillon de l’entrée et jette un regard à droite et à gauche et hausse les sourcils, pas de bécane. en tout cas pas celle qu’elle s’attendait à y trouver. Un sourire moqueur se dessine sur son visage avant de se muer en rire. Elle reste quelques secondes les bras ballants et le fusil complètement con au bout.

*Ok ! Tu m’as bien eue sale gosse ! *

Elle tourne alors les talons et rentre d’un pas décidé vers le maître d’arme en perdition, le regard mauvais comme au plus mauvais, jour de leur relation, parce que si, ça peut être pire qu’aujourd’hui. Le fusil proteste lorsqu’elle le pose sans ménagement sur le zinc_ heureusement qu’il n’est pas armé _ et elle plante son regard dans celui de Kierran, avant d’éclater de rire en lui prenant les deux joues entre ses pouces et index et les lui secouer comme les vieilles tentes à leurs neveux adorés.

“Mais c’est qu’il a été raisonnable le Kierran à sa Patsy! C’est bien ça.”

Comme il ne faut pas exagérer et qu’après le nez, faudrait pas lui arracher les joues, elle relâche son visage et le laisse se le masser et lui tape sur l’épaule.

“C’est cette fille qui t’a mis du plomb dans la cervelle ? »

Elle retourne lentement dans sa tour de contrôle, comme quoi, pas besoin de grand-chose pour faire retomber la pression. Elle en est pas encore à lui servir un autre verre, mais la voici avec un souci de moins en tête.

“Mon canapé ? Pas de problème. Y a la chambre d’ami aussi, si tu te dessapes”

*Tu as beau te dire que chez toi c’est chez toi et que ton petit nid c’est le tien, ton jardin secret, faut toujours qu’il y ait quelqu’un en perdition qui squatte ! En même temps c’est pas comme si ça te dérangeait vraiment.
_ C’est pas toi qui passes derrière ces ingrats qui laissent le bordel partout.*

Et puis elle hausse les épaules. Il veut pas lui présenter sa danseuse, pas de problème. Maintenant qu’elle sait que Kierran va pas se foutre en l’air sur son tricycle…

“C’est toi qui vois. Ha ! Ha ! Très drôle ! Je sens que je vais l’entendre un petit moment celle-là. Patsy elle sait pas reconnaître une moto !”

Et puis elle change vite de sujet de conversation le sourire aux lèvres.

“Pas la peine que je te demande ce que t’as pris comme décision pour cette fille. Vu l’état dans lequel tu t’es mis, c’est mieux de patienter que ça décante.”

La vaisselle est au moins provisoirement faite et tous les clients ont l’air d’être servis et la rouquine claque son torchon sur le comptoir avant de mettre les poings sur les hanches.

“Faut que je t’aide à monter les escaliers ou tu penses que tu peux t’en sortir tout seul ?”

En même temps elle soulève ses jupons jusqu’à sa jarretière et en extrait la clé de ses appartements. Elle a bien essayé entre les seins comme dans les films mais c’est pas du tout confortable et c’est tellement cliché et limite vulgaire !

Trop drôle ! C'te barre d'rire p'tain ! J'la r'garde sortir avec son fusil, meêm si ça s'voit en s'retournant qu'elle hésite, Patsy qui gobe pas c'que j'dis, ça change pas grand chose t'façon ! C'toujours comme ça 'vec la vieille gigue. Mais j'me marre comme un crétin ça c'est sûr !
J'la laisse faire, puis j'paye, parce que ouais au moins à elle j'donne mes sous, Toska, j'lai toujours pas payé, normal j'ai tout mis sur l'compte de l'autre reine des neiges dans sa robe rouge pute super collante. D'ailleurs faudrait qu'j'lui envoie un écho à cte conne, juste savoir si elle prend toujours bien soin d'la famille. J'ai pas d'contact avec eux, d't'manière, l'père doit avoir honte d'm'avoir mis là d'dans au lieu d'la frangine ouais. Doit s'en mordre les doigts jusque la clavicule ! Ayé v'là qu'j'y r'pense encore, en m'disant les mêmes choses encore.

J'tourne en rond dans ma propre caboche, mais Pat' qui r'vient elle m'r'met les pendules à l'heure, enfin elle m'fait atterrir plutôt, comme ça j'pars pas trop loin dans les pensées d'merde, celles qui déprime un mort. J'soupire, fixe la rouge teinturée et sourit, grimace, enfin y'a l'bas d'mon visage qui bouge quoi.
Elle éclate d'rire, et m'pince les joues. Bordel j'dteste ça. Tant et si bien que j'lui vire ses mimines fripées mais pas trop d'mes joues. "Lâche moi bordel..." J'parle on dirait j'ai douze patates chaudes dans la bouche. mais au moins mon r'gard peut lui faire comprendre : j'aime pas ça ! J'reprends mon visage et lui lance un r'gard noir, avant d'sourire et r'prendre ma thune, pour la foutre dans les poches d'mon jean.

L'canap ou la chamb' d'amis ? Chamb' d'amis ouais. "Chamb' j'préfère." J'souris à nouveau avant d'suivre des yeux son mouvement et arquer un sourcil, j'avais zappé qu'elle la foutait c'te clé ! Sexy encore les guibolles. Puis 'j'porte à nouveau les yeux sur ses mirettes. "T'm'aides à m'dessaper ?" J'pouffe d'rire avant d'lui tendre la main pour récupérer sa clé et m'diriger vers l'arrière du bar et m'trouver face aux escaliers. Ok ça va l'faire ! Ca tangue mais j'm'en branle comme l'an quarante ! Puis au moins, j'sais qu'là j'vais pioncer dans un lit confortable. J'grimpe en tanguant avant d'brailler une fois en haut "Ayé j'y suis Môman !!" J'ris encore, comme un abruti et ouvre, je galère à foutre la clé dans l'trou, mais après quelques essais j'y parviens, et comme j'connais la maison, j'vais direct là où j'veux, j'jette la clé sur la tab' de ch'vet et j'dégage jean, veste et t-shirt avant d'me laisser tomber sur l'lit et penser à tout ça.

Ok ! Elle se paie suffisamment la tête de son prochain pour accepter le retour de manivelle. Sinon ce ne serait pas de l’humour, mais de la méchanceté et Patsy, malgré ses excentricités, son ironie caustique et parfois ses coups de gueule elle est tout sauf méchante. Alors Kierran peut bien éclater de rire, elle ne va pas s’offusquer pour autant. Au début, elle avait trop la sécurité du maître d’armes en tête pour vraiment apprécier qu’il ne se gondole dans son dos. On peut même dire qu’elle sentait la moutarde lui monter au nez en envisageant qu’il tente de se payer sa tête et de grimper sur sa bécane en douce et elle se consolait en se disant qu’avec un bon coup de pétoire dans le moulin, rirait bien qui rirait le dernier. En se retrouvant dans la rue sans apercevoir la moto du petit farceur, elle en avait éprouvé du soulagement et une envie de se moquer d’elle.

Elle devait bien se rendre à l’évidence, elle s’était faite bernée presque plus par son propre côté maman poule que par son invité prêt à rouler en bas de son tabouret de comptoir. A savoir si ça lui servirait de leçon… Il y avait de forte chance que non. C’était bien rre que ses protégés se montre raisonnables. Mais pourquoi se mettait-elle toujours en tête de protéger les gens contre eux-mêmes ?! Y avait bien eu Joey qui avait un peu les pieds sur terre et qui savait quand il fallait s’arrêter. Mais ironie du sort, c’était elle qui s’en était allée en laissant toutes ces têtes brûlées sur le carreau dont une tellement perdue qu’elle n’avait pas donné signe de vie depuis belle lurette. Donovan ne perdait rien pour attendre lorsqu’il referait surface !

Ca pour sûr, elle allait en entendre parler de cette bonne blague et pendant un bon moment encore ! Et avec un peu de chance, Kierran s’empresserait de la raconter à tout le monde et là… Il y avait tellement de légendes qui couraient à son sujet, qu’elle n’était pas à une près.

*“Celle qui voit des motos fantômes” ! Ca claque ça non ? *

En tout cas, difficile de ne pas éclater de rire avec ce trou du cul. Il a l’air tellement réjoui et en même temps complètement out ! Faut dire que si elle s’est inquiétée pour lui, ce n’est tout de même pas pour rien. Même son rire et plein d’alcool ! Un peu de plus il fouettait l’air pour se libérer des pincettes de la rouquine. Lui qui est si coordonné et si précis, c’est dire !

“Allez fais pas ton pince sans rire !”

*Putain, mais c’est quoi ce jeu de mots pourris ? *

La tenancière se laisse aller à accompagner le maître d’arme dans sa crise de bonne humeur. Après tout, ce n’est pas si souvent qu’il se fend la poire. D’ailleurs depuis son arrivée, il était plutôt du genre à broyer du noir suffisamment pour noircir tout le bar. Encore heureux que la patronne sache dégoter les raisons de garder le moral même dans les fins fonds de l'âme des suicidaires !

“On n’y croit même pas que t’es fâché. Un peu de plus et je pense que tu veux que je recommence.”

Rien que d’imaginer la tronche qu’il va tirer à cette dernière phrase, son rire redouble. Sérieux, c’est pas tous les jours que ses petits trésors la font marrer comme ça et dans le style d’exercice, Kierran et vraiment très mauvais d’ordinaire. En général tout finit par une bonne engueulade.

*Faut-il qu’il soit rond pour en arriver là! *

Alors elle est assez fière d’elle d’avoir réussi à le mettre dans cette disposition Bon Monsieur Alccol l’avait bien aidée, mais même avec son concours ce n’était pas gagné. Elle secoue doucement la tête lorsqu’elle intercepte son regard sur ses jambes. Elle n’a pas assez de pudeur pour s’en offusquer et puis sa mine est loin d’être dégoûtée

*C’t’une litote ça hein ? *

Nouvel éclat de rire lorsqu’il lui demande un peu d’aide pour se désaper. Non mais quel con !

“Si tu veux bien, on va monter d’abord. Mes clients ont vue assez d’horreurs dans leur vie sans leur infliger ça !
Arn’ ! Salle !”

La rouquine avait rejoint le maître d’arme histoire de ne pas être trop loin s’il lui prenait l’envie de se ramasser la gueule sur le parquet. De son côté, Arn’ était passé maître dans l’art d'abandonner ce qu’il faisait au sous-sol pour suppléer les absences de sa patronne. Homme à tout faire n’était pas un vain mot pour parler le lui. Taciturne mais efficace, il avait pris l’habitude des frasques des protégés et de sa patronne à qui il vouait un véritable culte sans qu’elle ne s’en rende vraiment compte. Faut dire, qu’elle l’avait sorti de la panade et que depuis, il avait plutôt la vie douce pour quelqu’un qui agonisait dans la rue. C’était une bonne pâte qui n’était même pas dangereux pour les mouches, mais seulement pour ceux qui pouvaient avoir le début d’une idée de faire le plus petit mal à Patsy

Lorsqu’Arn’ pointa son nez au-dessus du niveau de la trappe, sa rouquine de patronne suivait son invité, prête à le réceptionner en cas de chute. Elle avait des allures de ménagère qui surveille les déménageurs avec les cartons de cristallerie dans des escaliers trop étroits. Pourtant ceux-là ont une largeur respectable. Arrivés en haut, elle plisse le nez et les oreilles si c’est possible au cri du maître d’armes. Non mais il ne s’est même pas aperçu qu’elle l’avait suivi !

A moitié hilare, elle le regarde se frayer un chemin jusqu’à la chambre d’ami et se pieuter à moitié à poil.

*L’est mignonnet le p’tit loup ! Mieux que lorsqu’il est sous ses frusques !
_ Moui… Ce qu’il faut là où il faut
_ Joli p’tit cul… Dommage qu’il ne sache pas se fringuer.
_ Et c’est une spécialiste qui parle. Mais on est d’accord pour une fois. *

La rouquine s’accroupit et profite que Kierran a déjà les yeux fermés pour lui déposer une bise sur le bas de la joue. Bah oui quoi, le haut est recouvert par son éternel bandeau cache pif.

“Si t’as besoin de quelque chose, tu sais où me trouver.”

Un peu de plus elle lui claquait une tape sur le fesse, mais faut savoir s'arrêter...